L’article L. 1224-1 du code du travail prévoit que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ».
Dans une telle situation, les contrats de travail des salariés sont automatiquement transférés d’une entreprise à l’autre. Ce qui suppose qu’il n’y a pas cessation de contrat donc pas d’indemnités de fin de contrat à verser par le cessionnaire aux salariés concernés, et que les éléments essentiels de la relation contractuelle doivent être poursuivis par le repreneur (ancienneté, qualification, rémunération particulièrement).
Lorsque les conditions d’application de ce transfert légal ne sont pas remplies, deux entités peuvent toutefois organiser entre elles un transfert d’activité accompagné du transfert des contrats de travail des salariés qui y sont affectés. Mais comme il s’agit d’une application volontaire de L. 1224-1, ce transfert n’est pas automatique. Il s’agit alors d’une modification du contrat de travail des salariés qui ne peut pas se faire sans leur consentement exprès.
Sans compter la nécessité de formaliser entre les deux structures juridiques et les salariés concernés la poursuite des relations contractuelles.
La Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de préciser en 2016 qu’une convention tripartite conclue entre un salarié et deux employeurs successifs organisait le transfert des contrats de travail de telle sorte que les salariés ne pouvaient pas prétendre à une indemnité de rupture de contrat au titre d’une rupture conventionnelle puisqu’il n’y avait justement pas de cessation de la relation de travail mais poursuite.
Dans un arrêt du 26 octobre 2022, dans le cadre de mutations intra-groupes, la Cour de cassation réaffirme la nécessité de signer une convention tripartite pour organiser la poursuite du même contrat de travail. Elle affirme que l’accord exprès du salarié, et des sociétés d’ailleurs, doit forcément être écrit et ne peut pas se déduire de l’attitude des parties ; en l’espèce deux sociétés du même groupe avaient accepté la situation et un salarié avait réalisé une demande de mutation mais n’avaient pas rédigé d’écrit encadrant cette situation.
Elle en déduit qu’à défaut d’une convention tripartite signée, il ne peut pas y avoir poursuite du même contrat de travail. Ce qui suppose que le salarié est fondé à demander des indemnités au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où le précédent employeur a laissé partir le salarié sans rompre son contrat de travail.
Cour de cassation, Chambre sociale, 8 juin 2016 n° 15-17.555
Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2022 n° 21-10.495